On y était / On y sera

Quatre pianos pour une journée

Publié le 12 octobre 2019

Pour ouvrir cette journée consacrée à Schumann pensée par Sylvie Brély, Schumann Oiseau Prophète se présente comme « un portrait de Schumann entre texte et musique », entremêlant de fait extraits de correspondance et courtes pièces musicales. Le saucissonnage d’œuvres comme le Carnaval, les Kreisleriana ou le Carnaval de Vienne, qu’il faut bien considérer comme étant chacune un tout organique, leur nuit. L’auditeur peine à entrer dans un univers musical et se concentre dès lors sur la narration et le texte — ne disons pas l’anecdotique car dans l’ensemble, les extraits et lettres, bien choisis, relatent autant une vie qu’un mode de… Lire la suite

Armide, troisième, ça tourne !

Publié le 2 avril 2019

En ce 1er avril, le public venu distraitement au Théâtre des Champs-Élysées, attiré par une affiche prometteuse annonçant « Armide », « Lully », « Hervé Niquet » et « Véronique Gens » a bien pu croire à un poisson d’avril aux premiers accords de l’ouverture du concert. Cette Armide totalement inédite, restée inachevée même, n’était en effet pas vraiment celle de Lully… Nouveau fruit de la collaboration qui unit de longue date le Centre de musique baroque de Versailles et Le Concert Spirituel, l’Armide « d’après Lully », de 1778, prolonge l’expérience entamée il y a trois ans avec la recréation du Persée, « d’après le même », de 1770. L’un… Lire la suite

Dante renaît à Saint-Étienne

Publié le 22 mars 2019

Les 8, 10, 12 mars ont eu lieu à Saint-Étienne trois représentations de l’opéra Dante de Benjamin Godard. Cette œuvre magistrale et passionnante créée en 1890 à l'Opéra Comique n’avait pas été donnée depuis. Le Palazzetto Bru Zane a exhumé l’œuvre et en a produit l’enregistrement. Librement inspiré de la vie de Dante Aliegheri ainsi que d’une partie de son œuvre majeure, la Divine Comédie, le livret d’Édouard Blau insuffle une dimension épique à cette oeuvre, mêlant différents tableaux dans « une unité de temps étendue » selon les mots du metteur en scène Jean-Romain Vesperini.

Les décors de… Lire la suite

L’adulte qui jouait

Publié le 28 novembre 2018

Des musiciens de l’Ensemble Appassionato dirigé par Mathieu Herzog, récemment salué pour son enregistrement des trois dernières symphonies de Mozart, s’emparent de la Gran Partita K. 361 du même compositeur pour en faire un véritable concert-théâtre en coproduction avec le Centre de Musique de Chambre de Paris (dir. Jerôme Pernoo).

On y entre de plain-pied par un dialogue qui sert de contrepoint à cette œuvre : celui de Mozart et son ami le clarinettiste Anton Stadler (incarnés respectivement par Léo Doumène et François Tissot qui tient également une des deux parties de clarinettes), attablés dans une brasserie viennoise et s’apprêtant à… Lire la suite

London calling Bruxelles

Publié le 4 novembre 2018

Handel in Context — tel pourrait être le titre de ce concert où les Muffatti sont rejoints par deux contre-ténors. Il s’agissait, dans ce programme élaboré en grande partie par Pedro Octavio Díaz, d’évoquer le Caro Sassone, mais aussi ses collègues, ses amis, ses rivaux… Ainsi, on a pu entendre un duo de Nicola Francesco Haym, plus connu comme librettiste de plusieurs opéras londoniens de Händel ; ou bien un autre duo de la Camilla de Bononcini, dont le relatif succès précéda l’arrivée de Händel en Angleterre. Au rang des maîtres, signalons Reinhard Keiser, qui dirigeait l’Opéra de Hambourg où Händel… Lire la suite

Ambronay rêve d’ailleurs

Publié le 15 octobre 2018

Pour cette dernière soirée (et avant-dernier jour) de son édition 2018, le festival d’Ambronay réunissait des artistes qui entretiennent un lien particulier avec lui : Sollazzo, déjà très remarqué, est un des ensembles associés du Centre culturel de rencontre , et on ne présente plus Mariana Flores aux festivaliers, tant ils ont eu d’occasions de l’entendre avec la Cappella Mediterranea, tout comme Quito Gato qui l’accompagnait. Et les deux programmes nous emmènent loin, que ce soit dans le temps ou dans l’espace…

Quittant les rivages du baroque, elle offrait un programme de chansons d’Argentine, évoquant non seulement Buenos Aires, mais aussi les… Lire la suite

Là-haut, sur la colline

Publié le 14 octobre 2018

Voici dix-neuf ans que les derniers jours d’août accueillent, à Vézelay et dans les villages voisins, les Rencontres musicales qui contribuent au renom de la région et de ses lieux d’exceptions : la basilique de Vézelay, l’église de Saint-Père, l’église d’Asquins… Ces joyaux, pour la plupart du Moyen Âge gothique, faisaient résonner cette année un programme d’un rare équilibre, dernier legs de Nicolas Bucher, le directeur sortant, qui, avant d’intégrer le Centre de musique baroque de Versailles, a su donner tout son sens au nom du festival. « Rencontres musicales » : rencontres humaines, certes, mais aussi rencontre improbable des genres, car à Vézelay,… Lire la suite

Stradella comme au premier jour

Publié le 14 septembre 2018

Grâce au travail d’Andrea De Carlo, la musique d’Alessandro Stradella sort progressivement de l’ombre au rythme d’une grande œuvre (opéra ou oratorio) par an, recréée d’abord au Festival créé autour du compositeur à Nepi et Viterbe, puis enregistrée pour Arcana. Cette année, c’est au tour d’Ester, liberatrice del popolo ebreo de retrouver les pupitres et de redevenir matière sonore.

On y retrouve avec bonheur Roberta Mameli, déjà Sainte Pélagie d’exception il y a deux ans. Dominant clairement la distribution, elle n’a qu’à ouvrir la bouche pour persuader : voilà une grande artiste, dont la moindre note est pleine de personnalité.… Lire la suite

L’air vivifiant des montagnes d’Auvergne

Publié le 20 aout 2018

C’est toujours autour du même petit village de Pontaumur et de son orgue que, pendant une semaine d’été, Bach rayonne sur l’Auvergne. Cette année, plusieurs concerts du festival Bach en Combrailles ont mis à l’honneur la pratique de l’arrangement, de la transcription. et de la recréation. Arrangements et transcriptions d’aujourd’hui, comme ceux que Guillaume Rebinguet-Sudre a signés pour son Ensemble Baroque Atlantique, ceux de Louis-Noël Bestion de Camboulas pour ses Surprises, ou encore l’entreprise du Hildebrand Consort de créer une messe luthérienne à partir de la Clavier-Übung III pour orgue de Bach ; mais aussi arrangements et transcriptions de l’auteur prolongés… Lire la suite

Les plaisants Fâcheux que voilà !

Publié le 10 juillet 2018

Fondé en septembre 2017, le Théâtre Molière Sorbonne entend mettre en pratique les recherches menées depuis une quarantaines d’années, dans l’optique historiquement informée, pour retrouver le jeu des comédiens des xviie et xviiie siècles. Il s’agit non seulement de travailler sur la prononciation et la déclamation, mais aussi de déterminer quelle prononciation et quelle déclamation employer pour quel texte, car on n’applique pas les mêmes règles à la tragédie et à la comédie, aux vers et à la prose… Cela implique donc non seulement la lecture (et la compréhension, et la confrontation) des traités « pratiques », mais… Lire la suite

Versailles, cœur battant du baroque français

Publié le 25 juin 2018

En découvrant la saison à venir du Centre de musique baroque de Versailles, on demeure ébloui. Neuf nouvelles productions d’opéras, plusieurs reprises, plus des récitals et l’activité ordinaire de la recherche et du chœur que constituent les Pages et les Chantres. Il y aura des pièces célèbres et des raretés. Bref, de quoi piquer la curiosité et satisfaire les appétits.

Alors que l’Opéra national de Paris semble n’avoir pas pris beaucoup d’intérêt à célébrer ses 350 ans dans sa programmation1, le Centre de musique baroque de Versailles rappellera avec éclat ce que fut l’Académie royale de musique jusqu’à la… Lire la suite

Les Indes hongroises

Publié le 3 mars 2018

Au fil des recréations, les deux phalanges dirigées par György Vashegyi, le Purcell Choir et l’Orfeo Orchestra, deviennent d’éminents défenseurs du répertoire lyrique français du xviiie siècle. C’est par Rameau qu’ils avaient entamé leur fructueuse collaboration avec le CMBV — Les Fêtes de Polymnie, publiées par Glossa en 2015 —, et, après un heureux détour par Mondonville, les revoici chez Rameau avec Les Indes galantes.

De cette œuvre-phare dont le nom est bien connu des mélomanes, dont certains passages (la danse du calumet de la paix) sont devenus des tubes, aucun enregistrement n’apporte entière satisfaction. Il faut croire toutefois que… Lire la suite

« C’est comme ça qu’il faut faire un concert »

Publié le 6 février 2018

On se sent privilégié d’assister à un concert de Pierre Hantaï. Toute cette beauté, toute cette intelligence, toute cette sensibilité, les a-t-on bien méritées ? Ce soir-là, celui que l’on peut raisonnablement considérer comme le plus grand claveciniste de notre temps nous a paru particulièrement en forme, prenant à plusieurs reprises la parole devant un clavecin de facture allemande, comme on en trouvait, explique-t-il, en Espagne. Et d’abord pour présenter Domenico Scarlatti, compositeur avec lequel Pierre Hantaï nourrit d’évidentes affinités et auquel il a consacré six enregistrements. Il nous parle d’un compositeur « imprégné par ses deux pays d’accueil » (le Portugal et… Lire la suite

« Tout conspire aujourd’hui à célébrer Lully »

Publié le 5 février 2018

Raconter la vie de Jean-Baptiste Lully en quarante-cinq minutes (durée règlementaire des concerts à la Folle Journée de Nantes), c’est le pari d’Hugo Reyne — ou, plutôt que la raconter, en retracer les principales étapes, des débuts comme danseur aux côtés du jeune Louis XIV à la mort, en passant par l’époque des ballets de cour et des comédies-ballets, puis celle des opéras.

Il faut d’abord louer le choix des pièces, quasiment toutes des essentiels de la production de Lully : le Sommeil d’Atys, oui, le monologue d’Armide « Enfin, il est en ma puissance », la Marche pour la cérémonie turque du Bourgeois Gentilhomme,… Lire la suite

A German Party

Publié le 4 février 2018

Georg Friedrich Händel, Johann Christian Bach, Carl Friedrich Abel : ces trois compositeurs ont en commun, à une génération d’écart, d’avoir quitté leur Allemagne natale pour s’installer à Londres. Le cas de Händel est bien connu : après son passage en Italie, il est quelques temps maître de chapelle à Hanovre mais ne rêve que de Londres, obtient l’autorisation de s’y rendre à condition de revenir dans un délai raisonnable… et ne revient pas. L’ironie du sort, c’est que son patron à Hanovre devient en 1727 roi d’Angleterre.

De la même manière, Johann Christian (en français, Jean-Chrétien) Bach fait un séjour en… Lire la suite

« Mon joli canari, il a pris sa volée »

Publié le 3 février 2018

C’est l’histoire d’un canari — ou plutôt des canaris, car ils furent nombreux à subir la vogue des oiseaux chanteurs dans les salons du xviiie siècle. De Purcell à Moussorgsky, en passant par Rameau, Telemann et même Fauré et Saint-Saëns, Alice Julien-Laferrière a conçu ce programme varié autour de ces oiseaux sans résumer le répertoire qui les évoque aux pièces imitatives. Ainsi, on goûte de suprêmes délices dans le sommeil extrait de La Bergère de Montéclair, avec ses dissonances à l’italienne ; on s’amuse fort avec un Chat de la Sonate représentative de Biber fort enlevé, et — plus inattendu… Lire la suite

D’un clavier à l’autre

Publié le 1 février 2018

C’est devenu notre petit rituel : chaque année, à la Folle Journée, nous allons écouter Jocelyne Cuiller au clavicorde. Comme l’an passé, nous en avons cette fois fait notre ouverture de festival. Dans son programme audacieux se côtoient Louis Couperin et les Bach, Froberger et Bartók, avec, pour commencer, deux tombeaux : celui de Ferdinand IV par Froberger, celui de Monsieur de Blancrocher par Louis Couperin. Bien que cet instrument de l’intimité eût pu y convenir à l’épanchement des douleurs face à la mort, Froberger ne « marche » pas très bien au clavicorde : il appelle l’ampleur du clavecin, car plus… Lire la suite

Un caravagesque au Musée de Nantes

Publié le 21 janvier 2018

Il est désormais courant, en musique ancienne, de découvrir de nouveaux compositeurs dont on n’avait guère entendu parler. La même chose dans les « Beaux Arts » est bien moins courante, et l’on peut dire qu’à cet égard, l’exposition consacrée à Nicolas Régnier par le Musée d’Arts de Nantes est un évènement. Car qui connaît Nicolas Régnier — qui le connaissait avant de voir fleurir par la ville les affiches qui montrent ce jeune homme assoupi la tête sur sa main ?

Peintre mineur, petit-maître ? On pouvait le craindre — mais dès qu’on entre dans l’exposition, la beauté caravagesque des premières toiles (comme Saint… Lire la suite

Deux papas, une maman : la naissance du trio en France

Publié le 6 octobre 2017

La France n’a guère traîné à s’emparer de la forme en trio à deux dessus et basse, et du vivant même de Corelli, en 1692, furent publiées les Pièces en trio de Marin Marais, qui sont encore des suites de danses, mais à trois voix au lieu des quatre ou cinq usuelles dans la musique orchestrale, ou des deux dans la musique pour un soliste et la basse continue. Bien moins connues, les sonates en trio d’Élisabeth Jacquet de la Guerre, claveciniste virtuose et compositrice de grand talent, datent des mêmes années — on les situe vers 1695, et prennent… Lire la suite

Rameau et les plaisirs

Publié le 4 octobre 2017

Il n’y a pas si longtemps — c’était au début du xxe siècle —, on a pu dire à propos de Lucien Guitry que « le plus grand comédien du monde ne laisse rien derrière lui », car en effet, on n’en avait aucun enregistrement. De la même manière, que nous reste-t-il de tous ces organistes du xviiie siècle qui n’ont rien publié de leur répertoire ? On sait que Rameau tint l’orgue, mais il ne nous reste rien de ce qu’il a joué — et l’on ne peut que rêver…

Rêver, et imaginer — car tout au long de sa carrière, Rameau… Lire la suite

Le triomphe de Charpentier sur les Italiens

Publié le 3 octobre 2017

On le sait bien, que Marc-Antoine Charpentier s’en alla quelques temps étudier en Italie — mais ce qui est frustrant, c’est qu’on ne sait presque rien de ce voyage en réalité. Il rapporta bien un peu de Carissimi — la Bibliothèque nationale de France conserve ainsi un manuscrit de Jephte copié de la main de Charpentier —, mais en fait on ne sait même pas à quelle date exactement il partit. Voilà qui est bien frustrant ! Dès lors, pas mal de chefs et d’ensembles se bornent soit à le mettre dans les mêmes programmes de Carissimi, soit à mâtiner… Lire la suite

Berlioz immense à Nantes

Publié le 25 septembre 2017

Si c’est aujourd’hui une œuvre assez bien connue, La Damnation de Faust, à sa création, fut cause de la ruine de Berlioz, et celui-ci s’en alla quelques temps à l’étranger (où l’œuvre fut d’ailleurs donnée plusieurs fois et eu plutôt plus de succès qu’en France). La forme, inhabituelle, n’y était sans doute pas pour rien — mais les intentions de l’auteur avaient aussi de quoi dérouter : l’a-t-on pas vu écrire que la fugue du deuxième tableau, telle qu’exécutée à Francfort en 1853, n’était « pas assez désagréable1 ? » Le public devait bien avoir du mal à admettre qu’un… Lire la suite

La fête des sens autour de Louis Couperin

Publié le 23 septembre 2017

« Car c’est merveilleusement agrémenter la bonne chère que d’y mêler la musique. » L’adage de la marquise Dorimène dans le Bourgeois gentilhomme a trouvé un écho favorable au festival des Promenades musicales en pays d’Auge, en Normandie, qui a eu l’excellente idée de faire se rencontrer les talents des artisans locaux avec ceux des musiciens invités — manière aimable, d’ailleurs, de rappeler qu’artiste et artisan ont ensemble un étroit parentage.

Ce jour-là, c’est dans le chais d’un des seuls vignobles de Normandie, Les Arpents du Soleil (attesté au moins depuis la carte de Cassini de 1761), que devaient se produire le Duo Coloquinte,… Lire la suite

La nuit remue

Publié le 23 septembre 2017

Petites drôleries de midi

Trois musiciens, quelques accessoires, un mélodica. Une performance en plein air à la croisée des arts : théâtre, bruitage, mime, chant, clapping… Mais que dire au juste de cet étrange spectacle qu’aucun mot ne peut décrire ou qualifier ? « Qu’est-ce que j’en pense ? Que vais-je essayer d’en penser ? Et surtout, que vais-je en écrire ? » : telles sont les questions qui se posent au critique de bonne foi qui a vu/entendu Les voix buissonnières. Si ce concert-performance nous a interloqués, et peut-être même plu, nous sommes bien incapables de dire pourquoi, car nous n’avons pas compris ! Mais, nous répondra-t-on, y avait-t-il… Lire la suite

Rencontres au sommet

Publié le 18 septembre 2017

Pour aller à certains festivals, il faut s’armer de patience. Ainsi, pour rejoindre Vézelay, dans l’Yonne, il ne nous fallut pas moins de trois trains. Charmant petit village médiéval construit sur une colline où la basilique Sainte-Marie-Madeleine culmine, Vézelay est connu pour être un point de départ du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, mais ce sont les Rencontres musicales qui y ont lieu en août qui sont l’objet de notre attention. Rencontres humaines enrichissantes, mais aussi rencontres des genres : la musique savante (de la Renaissance au xxie siècle) côtoie la musique populaire (chanson française, jazz, hip-hop…), et chaque jour à Vézelay… Lire la suite

Bouquet vénitien pour les anches

Publié le 13 septembre 2017

Chaque année, le Festival de Sablé s’achève par une « grande veillée », un concert un peu plus long que les autres ou cours duquel plusieurs ensembles se succèdent et se rencontrent pour des concertos, simples, doubles et parfois plus ; il y a eu des concertos pour flûtes (traversières et à bec) de Telemann, des concertos pour violon(s) de Vivaldi, des concertos pour clavecin de Bach… Cette année, c’était au tour des anches de prendre d’assaut la scène de L’Entracte de Sablé pour des concertos vénitiens. Mais les ensembles qui pratiquent ce répertoire sont peu nombreux, de sorte que toute la scène… Lire la suite

Vivante fidélité à Stradella

Publié le 6 septembre 2017

C’est très vraisemblablement en 1681 qu’Alessandro Stradella (1639–1682) a achevé son opéra La Doriclea. Dans une lettre adressée le 24 mai à Flavio Orsini, duc de Bracciano, Stradella évoque la préparation d’ « un petit opéra de cape et d’épée à six personnages ». — description qui correspond bien à l’intrigue de la Doriclea dans laquelle le fer « se montre deux fois », et où le nœud de l’intrigue est une scène de nuit. De plus, les chanteurs que le compositeur évoque peuvent parfaitement correspondre à la distribution requise pour la Doriclea : Margherita di Bologna et « une de ses sœurs » ont dû… Lire la suite

Telemann et Olga Pashchenko, l’art et la manière

Publié le 1 septembre 2017

Après trois disques fort réussis, il était temps que nous puissions entendre Olga Pashchenko en concert. Le festival de Sablé nous en fournit l’occasion, en l’invitant dans le cadre de son cycle consacré à Telemann pour le 250e anniversaire de sa mort.

Les fantaisies pour flûte seule son couramment fréquentées des flûtistes, et celles pour violon ne sont pas moins connues ; récemment, on a redécouvert aussi celles pour viole qui jouissent déjà de plusieurs enregistrement, dont tout récemment ceux de Robert Smith et de Paolo Pandolfo ; mais celles pour clavecin, quoiqu’elles n’aient jamais été perdues, ne jouissent pas de la même… Lire la suite

Heureuse naissance

Publié le 31 aout 2017

C’était l’une des soirées les plus attendues de cette 39e édition du Festival de Sablé, car la naissance d’un ensemble est toujours un petit évènement. C’est donc avec le sentiment de prendre part à un moment important pour la vie musicale à venir que nous avons assisté au premier concert de La Diane Française dirigé par Stéphanie-Marie Degand, consacré aux Indes galantes de Rameau dans une version réduite.

Réduite, en effet, d’abord par la durée, puisque le tout devait occuper une soirée du Festival de Sablé sans excéder les deux heures, entracte compris ; réduit aussi par l’effectif : une vingtaine d’instrumentiste et… Lire la suite

Le grand écart à Bach en Combrailles

Publié le 22 aout 2017

Pour sa xixe édition, le festival Bach en Combrailles dépasse les « frontières » du baroque et étend son exploration jusqu’à la fin du xixe siècle, avec le Quintette pour piano et cordes et la Sonate pour violon et piano de César Franck — le lien se fait de lui-même, puisque ce dernier fut surnommé le Bach de son temps. Pour étoffer le programme, des lectures de Bach par d’autres compositeurs ou interprètes du XIXe siècle étaient proposées : le célébrissime Ave Maria de Gounod, dans une version pour violon et piano, un arrangement pour piano seul d’un mouvement de sonate… Lire la suite

Le corps et l’âme

Publié le 18 aout 2017

Il y a deux ans, Olga Pashchenko devait venir jouer du clavecin au festival Bach en Combrailles. Pour d’obscures raisons administratives, elle ne put venir et Jean-Luc Ho, presque à l’improviste, vint la remplacer. Pour le festival, ce fut une sorte de révélation — tant et si bien que, si l’an passé le claveciniste n’y fut pas, il est désormais « artiste en résidence » à Bach en Combrailles pour trois ans, de 2017 à 2019. Il se voyait donc confier pour cette dix-neuvième édition une journée entière, avec un récital l’après-midi, un concert « Jean-Luc Ho and Friends » en soirée, et, en… Lire la suite

« Quels doux supplices ! quelles délices ! »

Publié le 7 février 2017

En France, avant l’âge d’or de la partition publiée (et en particulier gravée), une première école de compositeurs a fleuri : c’est celle d’avant Marais pour la viole (les Hotman, Dubuisson, Sainte-Colombe), c’est la génération qui précède celle de François Couperin, avec son oncle Louis et celui que l’on considère généralement comme le « fondateur » de l’école française de clavecin, Jacques Champion de Chambonnières, mais aussi des clavecinistes moins connus comme Étienne Richard ou Jacques Hardel. Nombre de leurs pièces sont regroupées dans le « manuscrit Bauyn », qui doit son nom à André Bauyn, aux armes duquel il est relié. On y trouve… Lire la suite

Mr Cuiller his fancies

Publié le 5 février 2017

Il est tard — 22h15, pour un début de concert « classique », c’est tard —, le public est clairsemé dans la petite salle de 80 places, de sorte qu’on a l’impression de faire partie des happy few. Sur la scène, il y a deux clavecins, rouges tous deux, l’un tout petit, l’autre, long, de modèle italien, un peu plus décoré ; tous deux sont de Philippe Humeau.

L’an dernier, déjà, nous avions écouté Bertrand Cuiller dans un programme de « virginalistes » anglais (guillemets, car ils ne jouaient pas que du virginal, ces compositeurs, mais aussi du clavecin), et c’était l’émerveillement. Nous avons… Lire la suite

Danse, mémoire

Publié le 4 février 2017

Si la musique contemporaine s’est fait une place à la Folle Journée de Nantes, ce qu’il y a avant le baroque a eu plus de peine à s’y retrouver. On ne peut que se réjouir, pour cette édition 2017, d’y entendre l’ensemble Doulce Mémoire, l’un des fleurons de la musique Renaissance en France, dans un programme haut en couleur.

La forme, d’abord, a dû étonner les spectateurs habitués aux ensembles baroques ; ici, les musiciens de Doulce Mémoire jouaient tout par cœur, se déplaçaient, changeaient d’instrument (flûtes, doulçaines, bombardes) à tire-larigot… Bref, autre temps, autre style musical, autres mœurs. Il y a,… Lire la suite

L’amour vainqueur

Publié le 2 février 2017

Commencer la Folle Journée — pour nous, du moins, car il y avait quelques autres concerts auparavant — par du clavicorde nous paraissait un paradoxe intéressant : en concentrant tant de « festivités » musicales en un seul lieu, le festival nantais s’avère, disons, un peu bruyant, et assurément animé, quand le clavicorde, lui, est l’instrument du calme. Dans cette petite salle de quatre vingts places, les bruits du hall, du dehors, parfois nous parviennent, et rappellent qu’à la porte le monde gronde, mais la sonorité discrète du clavicorde est une invitation à la concentration, une invitation à les entendre, peut-être, mais pas… Lire la suite

Folle Journée 2017 : notre choix de concerts

Publié le 16 decembre 2016

C’est donc le thème de la danse qui sera au cœur de la Folle Journée 2017. Autant dire qu’il permet d’explorer toutes sortes de répertoires, que ce soit avec de la musique explicitement écrite pour la danse ou avec des œuvres s’inspirant de la danse mais non destinées à être dansées. Le baroque sera bien sûr à l’honneur, mais la musique romantique et contemporaine ne seront pas absentes, loin de là. Voici quelques concerts à ne pas manquer, avec des programmes alant du Moyen Âge au xxie siècle, et des interprètes parmi les meilleurs de la scène musicale d’aujourd’hui.

La… Lire la suite

Les plaisirs de Versailles

Publié le 29 novembre 2016

Le programme imaginé par le Centre de musique baroque de Versailles et présenté à Budapest (Palace of Arts) le 23 novembre, puis rejoué à Versailles (Opéra royal) le lendemain avait de quoi dérouter de prime abord : en prémices à l’exposition du Château de Versailles consacrée aux « Fêtes et divertissements à la Cour », le directeur artistique du CMBV, Benoît Dratwicki, a conçu un « pastiche » à partir d’extraits de différents ouvrages créés ou joués à la cour entre 1660 et 1780, manière originale de faire revivre (partiellement) un répertoire encore oublié et de tenter de prouver, s’il en est besoin, que cet… Lire la suite

Évohé, Offenbach est roi

Publié le 23 novembre 2016

« Toujours la foule et, en conséquence, toutes nouveautés ajournées1. » C’est en ces termes que le critique Jules Lovy, le 12 décembre 1858, constate le succès d’Orphée aux enfers d’Offenbach, créé presque un mois plus tôt, le 21 octobre, au théâtre des Bouffes-Parisiens. Il faut dire qu’une polémique était venu gonfler la publicité du spectacle : en 1858, en effet, se moquer si vertement de la mythologie et en particulier du mythe d’Orphée, si cher aux créateurs, poètes et musiciens, c’était s’attirer les foudres d’un pan de la critique, dont le plus éminent représentant fut alors Jules Janin, « prince des… Lire la suite

Salieri à la conquête de Versailles

Publié le 30 octobre 2016

Après la recréation des célèbres Danaïdes de Salieri en 2013 — premier opéra français du compositeur pour l’Académie royale de musique (1784) —, le Centre de musique baroque de Versailles a eu l’heureuse idée de poursuivre la redécouverte et la réhabilitation des ouvrages « parisiens » du compositeur, dont le troisième, Tarare, a été remonté en scène il y a fort longtemps sous la direction de Jean-Claude Malgoire. Créés à la cour puis à Paris à la fin de 1786, Les Horaces n’eurent pas le même succès que les deux autres œuvres. La réception mitigée était à l’époque clairement due… Lire la suite

Tout près du soleil

Publié le 16 octobre 2016

Alors que l’art de Cavalli a eu sans nul doute un rôle fondateur pour tout le genre opératique, y compris français, le compositeur n’avait pas été encore joué à l’Opéra national de Paris. C’est désormais chose faite avec une brillante production d’Eliogabalo, ultime opéra conservé de Francesco Cavalli (Coriolano et Massenzio, ultérieurs, sont tous deux perdus). L’œuvre avait déjà failli se présenter au Théâtre des Champs-Élysées dans la production dirigée par René Jacobs et qui fit les délices de la Monnaie en 2004, mais l’affaire, finalement, ne s’était pas faite, de sorte que c’est au chef argentin Leonardo García Alarcón… Lire la suite

Retraite à l’abbaye d’Ambronay, de Matteo da Perugia à Bach

Publié le 12 octobre 2016

Le festival d’Ambronay, qui fête cette année son trente-septième anniversaire, et qui compte maintenant parmi les scènes les plus réputées pour la musique ancienne, a de nouveau enchanté à tous points de vue le rédacteur du Babillard qui s’y est rendu cette pour le week-end. Du 23 au 25 septembre.

L’on pourrait dire que ce fut globalement, de vendredi à dimanche, un sans faute : toutes les prestations auxquelles nous avons pu assister nous ont semblé réussies, sous la direction de chefs talentueux, servies par des musiciens de qualité, maîtrisant à la fois leurs répertoires respectifs et — est-ce utile de le… Lire la suite

Fragments d’un discours forain

Publié le 8 octobre 2016

Depuis de nombreuses années, des recherches ont levé le voile sur tout un pan de théâtre du xviiie siècle, en particulier de la première moitié du siècle, appelé « théâtre de la Foire » ou « des Foires ». L’appellation, bien qu’elle soit d’époque1, peut tromper : les théâtres des Foires ne sont pas des tréteaux dressés au milieu d’un carrefour venteux, image encore souvent véhiculée2, mais bien de véritables théâtres « en dur », avec leurs loges, leur fosse et même de la machinerie, car ces Foires devaient davantage ressembler à des centres commerciaux qui n’auraient de bail que trois mois par… Lire la suite

Signori, un capolavoro*

Publié le 16 septembre 2016

Pour sa quatrième édition, le Festival international Alessandro Stradella, basé à Nepi, ville natale présumée du compositeur, s’est ouvert avec l’oratorio Santa Pelagia, assurément l’une des partitions les plus riches de Stradella. C’est aussi une partition (et un livret) pour le moins ambigu, et Stradella et son librettiste y livrent une vision pour le moins personnelle du cheminement de la Sainte.

Mais qui était donc Sainte Pélagie ? Les Vies des Saints pour tous les jours de l’année donnent deux Pélagie ; celle qui nous occupe est fêtée, éventuellement, le 8 octobre.

Sa première profession fut d’être comédienne à Antioche. Ayant été touchée… Lire la suite

Bach et ses contemporains en Auvergne

Publié le 17 aout 2016

On a tendance aujourd’hui à considérer que Bach ne saurait qu’éclipser ses contemporains, ainsi que l’avait déjà remarqué Romain Rolland : « L’histoire est la plus partiale des sciences. Quand elle s’éprend d’un homme, elle l’aime jalousement, elle ne veut plus entendre parler des autres. Du jour où a été reconnue la grandeur de J.-S. Bach, tout ce qui était grand de son temps est devenu moins que rien1. »

Ce jugement s’est en partie construit par la forte personnalité de sa musique, mais aussi par une vision romantique du génie qui doit être seul, original et incompris ; à cet égard, la… Lire la suite

Et si, finalement, recherche et spectacle vivant faisaient bon ménage ?

Publié le 15 avril 2016

En 2005 était représentée la production du Bourgeois gentilhomme mis en scène par Benjamin Lazar. Par son succès éclatant, ses nombreuses reprises et sa publication en dvd, parce qu’elle reprenait un certain nombre de préceptes que l’on trouve dans des traités du xviie siècle, elle a donné l’impression d’être l’équivalent du travail des « baroqueux » en musique, d’être très parfaitement conforme aux sources et de réaliser le vœux de Philippe Beaussant à la fin de Vous avez dit baroque ? : voir la représentation théâtrale entrer, elle aussi, dans l’historiquement informé. C’était oublier qu’il s’agissait aussi, voire surtout, d’une vision artistique personnelle,… Lire la suite

Persée royal

Publié le 12 avril 2016

Cette soirée était l’une des plus attendues de la saison 15-16 du Théâtre des Champs-Élysées, à la fois par l’originalité de l’œuvre présentée, mais aussi par la qualité de l’affiche, réunissant une distribution plus que prometteuse. Les attentes ont été – et de loin – remplies. Les salves d’applaudissements et les nombreux rappels réservés aux artistes à la fin de la soirée en témoignent.

Avec Armide ou Atys, Persée est sans doute l’une des plus belles tragédies de Lully et Quinault. Est-ce à cause de la complexité des effets scéniques qui s’y déploient, de l’importance de la distribution, ou de la… Lire la suite

« Ces rois que l’univers admire »

Publié le 7 février 2016

Avec La Rêveuse, décidément, on n’est jamais déçu. Bien que portant un nom emprunté à Marin Marais et évoquant dès lors la musique française, l’ensemble a jusqu’ici relativement peu exploré la cantate française. Beaucoup d’œuvres, de fait, sont difficiles à défendre. Tel n’est pas le cas du Sommeil d’Ulysse d’Élisabeth Jacquet de La Guerre, où l’on se laisse porter par l’intrigue inspirée de l’Odyssée (quoiqu’assez survolée), et où chaque mouvement a été soigneusement dosé. Ainsi, le « Sommeil » qui donne son nom à la pièce s’arrête juste avant qu’il pût lasser — et juste assez, donc, pour être un vrai sommeil… Lire la suite

Le triomphe de Prométhée

Publié le 7 février 2016

« Fascinés par le mythe de Prométhée, Liszt et Scriabine entretiennent chacun un rapport privilégié avec l’élément-feu ; c’est ce qui a conduit Jonas Vitaud à concevoir un programme entièrement centré sur cet élément, avec le feu consolateur des Saisons de Tchaïkovski, auquel s’oppose le feu de la passion romantique de Liszt et le feu mystique des dernières pièces de Scriabine. » Devant un texte de présentation si convaincant, on aurait eu peine à résister à l’envie d’aller écouter Jonas Vitaud. Et l’on aurait eu, au demeurant, tort d’y résister.

Le concert semble construit comme une montée en puissance en deux temps : un feu… Lire la suite

Dans un jardin anglais

Publié le 6 février 2016

Le monde est fait de détours. Si le thème de la Folle Journée est la nature, certains concerts sont prétexte à des digressions. Ainsi, partant des variations sur Pescodd Time (« le temps des petits pois ») composées par William Byrd, Bertrand Cuiller a construit un programme où les évocations de « la nature » sont globalement absente, si l’on excepte la fort amusante pièce The King’s Hunt de John Bull. Mais au fond, qu’importe ? Un concert n’est pas une thèse de doctorat, et l’on peut bien s’écarter un peu du thème… comme le dit Flaubert, la Beauté, « il n’y a dans le monde… Lire la suite

La nature et les nations

Publié le 6 février 2016

L’ensemble Ricercar est un habitué de la Folle Journée. Depuis que nous nous y rendons — et cela commence à faire un certain temps —, nous n’avons souvenir d’une édition où il fût absent. Abondance de bien ne nuit pas : cette année, il propose plusieurs programmes. En combinant les deux programmes « Le Vent » et « Les Animaux », on parcourt la France, l’Allemagne, l’Autriche et l’Italie baroques.

L’un d’entre eux, « Le Vent », est consacré à la musique française, et composé de pièces de Pierre Gautier de Marseille et Marin Marais, d’extraits de Castor et Pollux de Rameau, et de la cantate Léandre et… Lire la suite

Jean-Féry Rebel, le Chaos et les douceurs

Publié le 5 février 2016

Difficile d’évoquer la nature sans évoquer les éléments. Pour les compositeurs du xviiie siècle, ils sont liés au chaos : c’est en effet du chaos que les quatre éléments ont été « débrouillés ». Avant que Rameau dépeigne ce « Débrouillement du chaos et choc des Éléments quand ils sont séparés » dans l’ouverture de Zaïs (1748), le compositeur Jean-Féry Rebel, violoniste, père d’un autre compositeur célèbre et non moins violoniste, avait déjà donné en 1737 (l’année de Castor et Pollux) des Éléments précédés d’un Chaos. La forme était celle d’une « symphonie de danse », œuvre entièrement musicale et chorégraphique sans partie chantée telle que lui-même… Lire la suite

Grenouilles, à mon sens, ne résonnaient pas mal

Publié le 4 février 2016

Il était attendu qu’un ensemble s’appelant Les Esprits Animaux pourrait proposer quelque chose sur… les animaux. Ce qui l’était moins, c’était que le programme fût centré sur un concerto anonyme. Notre époque n’aime pas les œuvres anonymes. Il faut un auteur ; il faut un responsable ; il faut créditer. Et pourtant, ce concerto Clamore gallinarum (« La clameur, le bruit des poules », et non « le chant du coq » comme traduit dans le programme) est bien, comme le signale par présentation, « une œuvre […] pleine d’humour, d’imagination et d’une grande qualité de composition ». Intégrant l’imitation des poules, ou du moins… Lire la suite

Trois quarts d’heure de grâce

Publié le 4 février 2016

J’ai déjà, dans les pages du Babillard, évoqué à plusieurs reprises le clavicorde. Il me faudra le faire encore une fois.

Programmer du clavicorde au sein de la Folle Journée est pour le moins osé. Le lieu est assez agité, voire bruyant, et le public peu discipliné à certains moments. Ainsi, hier, pendant que Jocelyne Cuiller jouait Carl Philipp Emanuel Bach et pendant qu’Hoshino Yuko lisait Mishima, certains entraient en retard ou sortaient avant la fin, ce qui, en plus d’être d’une goujaterie assez innommable et d’autant plus scandaleuse que les concerts à la Folle Journée durent 45 minutes, est très-gênant… Lire la suite

Rencontre avec Joëlle Kerivin, nouvelle directrice de la Folle Journée de Nantes

Publié le 8 janvier 2016

C’est une des nouvelles têtes de la Folle Journée : Joëlle Kérivin a succédé à Michèle Guillossou en tant que directrice générale de la SAEML, la société qui assure la production de la Folle Journée aux côtés de René Martin, son directeur artistique. Un mois avant l’évènement et à quelques jours de l’ouverture de la billetterie, elle nous a reçu et nous a accordé un long entretien.

Le Babillard. Parlez-nous un peu de votre parcours : qu’est-ce qui vous a amenée jusqu’à la Folle Journée ?

Joëlle Kerivin. J’ai plutôt, au tout début, un parcours dans la communication et l’événementiel, mais très rapidement, je me… Lire la suite

Concerts choisis fort subjectivement

Publié le 8 janvier 2016

Parmi les quelque 340 concerts qui constitueront la Folle Journée de Nantes cette année, que choisir ? Le Babillard vous propose un choix — forcément subjectif — de quelques moments qui devraient être forts, en mettant particulièrement l’accent sur ce qui pourrait faire écho à l’essentiel des disques et des concerts qui prennent place en ses pages : le domaine dit « classique », et en particulier la musique ancienne que nous connaissons particulièrement bien. Autrement dit, ce choix répond à l’argument suivant : si vous allez à l’un de ces concerts, je suis à peu près sûr que vous ne serez pas déçus. Est indiqué, après… Lire la suite

Échos de la Folle Journée de Nantes 2016

Publié le 5 novembre 2015

Alors que va se tenir à partir de la fin du mois de novembre la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques à Paris, plus connue sous son nom de COP 21, le thème de la Folle Journée 2016 (puisque désormais, la programmation est thématique) sera « la Nature ». Il était déjà connu, et l’on avait hâte de savoir ce que la programmation réserverait à part les Quatre Saisons de Vivaldi arrangées à toutes les sauces possibles et imaginables.

Une programmation variée

La nature a été entendue dans une acception assez vaste, et plusieurs ramification seront explorées : les saisons, les paysages (incluant des… Lire la suite

Le chant de la terre portugaise

Publié le 29 octobre 2015

Pour cette nouvelle création à Ambronay, l’ensemble Seconda Pratica, qui avait convaincu dans un autre programme, explore ses racines portugaises. Ses musiciens nous ont ainsi offert une émouvante plongée dans leur terre et sa culture populaire, ses origines anciennes et profondes, ses traditions orales, mais aussi dans le répertoire savant des xve et xvie siècles de la péninsule ibérique.

L’entrée en matière, quoique intrigante, n’augurait pourtant rien de bon : des allers-retours pour installer des sièges sur la scène, dans une sorte d’évocation du chant populaire d’allure un peu parodique, peut-être pour mieux lui rendre justice ensuite ? Curieuse idée,… Lire la suite

Distant n’est pas royal

Publié le 23 octobre 2015

Il y a des concerts auxquels on ne se rend pas sans une certaine appréhension. Tel était le King Arthur donné conjointement par La Fenice et Vox Luminis — et c’est surtout ce second ensemble qui cristallisait les attentes : à force d’être loué hautement, on finit par se dire que, tout de même, ça doit bien être bien. Nous l’avions déjà entendu au festival de Sablé sans être convaincus par la lecture adoptée (très sobre, pour ne pas dire dépouillée), selon nous en décalage complet avec le répertoire, qui appelait davantage de brillant et d’investissement dramatique. Bon, cela arrive, nous… Lire la suite

La force du mystère

Publié le 3 octobre 2015

Vous sortez d’un premier concert — qui d’ailleurs ne vous a pas convaincu mais là n’est pas la question — et vous allez vers un autre. Ça commencera à 22h30. C’est au même endroit, dans l’abbatiale d’Ambronay, mais le public est disposé différemment : les musiciens, toujours placés à la croisée du transept, font face au chœur et non plus à la nef, et les écoutants sont sur les côtés du transept, dans le chœur et l’abside. Il y a donc beaucoup moins de monde, l’ambiance est plus intimiste, et puis, la nuit est tombée et instaure encore plus de silence,… Lire la suite

Les amours de Cavalli

Publié le 28 septembre 2015

Venise, première moitié du xviie siècle. L’opéra naissant s’impose ; ouvert à tous à condition de pouvoir payer sa place, et assez indépendant du mécénat, le genre marque un tournant dans la vie musicale et urbaine européenne. Francesco Cavalli est le compositeur marquant des débuts de l’opéra vénitien : à partir de 1639, il en donne un quasiment tous les ans, laissant à la postérité bien plus d’opéras que son plus illustre (du moins aujourd’hui) prédécesseur, Monteverdi ; c’est cet héritage que Leonardo García Alarcón et sa Cappella Mediterranea rejoints par quelques membres de l’ensemble Clematis se sont donné pour mission de… Lire la suite

Seconda Pratica, ensemble de premier ordre

Publié le 18 septembre 2015

Quand on va d’un festival à l’autre, il y a des ensembles que l’on n’a pas encore eu l’occasion d’entendre et que, d’un seul coup, on va retrouver deux fois à quelques semaines d’intervalle. Il y a alors cette petite appréhension : « j’espère que ça va être bien, sinon, j’aurai pas envie de les réécouter ». Si, avant même d’avoir écouté Seconda Pratica à Sablé, je savais que je retrouverai ce jeune ensemble dans un autre programme à Ambronay, je pouvais au sortir du concert du 27 août me réjouir de celui qui aurait lieu une vingtaine de jours après, même… Lire la suite

Et vive Silbermann !

Publié le 14 septembre 2015

Johann Friedrich Agricola, élève de Bach, raconte qu’à une date indéterminée, Gottfried Silbermann, facteur d’orgue de son état, ayant fabriqué deux instruments qu’on appelle aujourd’hui pianoforte, s’en vint montrer son travail à Johann Sebastian Bach, qui les essaya. Ce dernier « avait loué et même admiré la sonorité, mais en même temps, il avait reproché que l’aigu était trop faible et trop difficile à jouer ». L’action se situe probablement en 1736.

Monsieur Silbermann, qui ne pouvait souffrir la moindre critique à l’endroit de ses instruments, avait très mal pris la remarque, et il en voulut longtemps à Monsieur Bach pour cela.… Lire la suite

Bis repetita (iberica) placent

Publié le 12 septembre 2015

Le Babillard s’est déjà fait l’écho d’un programme tout à fait similaire donné par La Galanía au festival Musique et Nature en Bauges, quoique portant un titre différent. Est-ce pour souligner les menues différences que l’intitulé est ici devenu Farsa y Picaresca ? L’ordre des pièces a changé, mais surtout, et en l’occurrence hélas, le superbe lamento de Pico y Canente de Juan Hidalgo a disparu, afin de mieux “coller” au thème du festival (« Farce(s) »).

Si nous avons souhaité réentendre Raquel Andueza et La Galanía, c’est d’abord parce que c’était très bien la première fois et que dès lors, on… Lire la suite

Le Triomphe de la Coquetterie

Publié le 11 septembre 2015

Ayant déjà présenté La Double Coquette à l’occasion du coffret Dauvergne-Pesson de l’ensemble Amarillis, on se contetera ici de quelques remarques sur la première française de la version mise en scène qui a été donnée dans le cadre du Festival de Sablé, après avoir déjà fait l’objet d’une tournée en Asie.

Tout d’abord, la musique a fait l’objet de plusieurs additions supplémentaires de Gérard Pesson, tissant encore plus étroitement le lien entre sa partition et celle de Dauvergne. Si l’on est heureux que le disque fasse une juste part à l’œuvre originelle, il faut reconnaître que pour la version… Lire la suite

La reine vierge et religieuse d’Alessandro Stradella renaît à Nepi

Publié le 7 septembre 2015

Nepi est une petite ville d’un peu moins de 10 000 habitants (la population a doublé ces dernières années) située à environ 50 km au nord de Rome, dans la province de Viterbe, et célèbre aux alentours pour son eau, légèrement pétillante. Ce fut une possession de Rodrigo Borgia, qui, après avoir été élu pape sous le nom d’Alexandre VI en 1492, la cèda d’abord à Ascanio Sforza en guise de remerciement pour son soutien, avant de la lui reprendre pour la donner en 1499 à sa fille, Lucrèce, qui fut d’ailleurs plutôt aimée de la population locale. Mais la terrible Lucrezia Borgia… Lire la suite

Une douce aventure aux pays de Couperin

Publié le 6 septembre 2015

Quand en 1726 il publie Les Nations François Couperin a déjà à son actif trois de ses quatre livres de pièces de clavecin, les Concerts royaux (1722) et les Les Goûts réunis ou Nouveaux Concerts (1724). Il se tourne alors vers le genre qui véritablement peut incarner cette « réunion des goûts » : le trio, genre dans lequel il a publié déjà les deux Apothéoses (de Corelli puis de Lully) — et pour incarner définitivement cette synthèse franco-italienne, il choisit de faire figurer dans chaque suite (appelée Ordre) une « Sonade » suivie de plusieurs danses, rappelant en cela un modèle pratiqué non pas… Lire la suite

Bach à la maison

Publié le 4 septembre 2015

Pour son édition 2015, à côté d’une programmation sur le thème de la farce, le festival de Sablé a choisi de proposer un cycle autour des claviers anciens, et de l’ouvrir par le plus discret, le clavicorde. Nous avons déjà évoqué cette atmosphère si particulière que peut créer un concert de clavicorde, atmosphère d’écoute où l’oreille, comme le disait si bien Marcia Hadjimarkos elle-même en ouverture de son concert, s’habitue progressivement comme l’œil dans la nuit ; ici, cet éther d’écoute s’installait immédiatement pour ne pas se rompre avant la fin, pas même sous le poids des applaudissements qui… Lire la suite

Le clavicorde a un prêtre, il lui fallait donc un temple

Publié le 26 aout 2015

Un concert de clavicorde est une chose périlleuse, car l’instrument, on le sait, est d’une rare discrétion. Concrètement, à quatre mètres, on n’entend plus grand-chose. Aussi pouvait-on nourrir quelque inquiétude à l’idée que Mathieu Dupouy allait se produire dans l’église de Landogne. Ce n’est pas seulement la grandeur du lieu qui pouvait inquiéter, mais aussi sa forme en longueur : il vaut mieux disposer le public autour du clavicorde. L’église de Landogne est petite, mais sans doute pas assez encore. Aussi, sitôt Gilles Cantagrel eut-il conseillé aux auditeurs, en introduction, de se rapprocher autant qu’il serait possible, sitôt étais-je levé et… Lire la suite

Quand le clavecin français inspirait l’Europe

Publié le 22 aout 2015

Quand est annoncé un changement de programme, on craint la déception. On avait choisi, soigneusement, ce qu’on allait écouter. Après tout le bien que j’avais pensé, dit et écrit des deux disques d’Olga Pashchenko au pianoforte (ici et ici), je me faisais, évidemment, une joie d’avoir enfin l’occasion de l’entendre “en vrai” ; surtout qu’il y avait du Reincken au programme, compositeur trop peu joué que j’affectionne particulièrement depuis certain disque de La Rêveuse. On ne déplorera cependant que l’occasion manquée, car le “remplacement” valait tout aussi bien le déplacement, et l’on ne pouvait qu’être… Lire la suite

Une Espagne en or depuis un fauteuil des Bauges

Publié le 20 aout 2015

Au moment où, vers le milieu du xviie siècle, commence ce qu’il est convenu d’appeler le « Grand Siècle » français qui verra éclore La Fontaine, Molière, Mesdames de Sévigné et de Lafayette, Racine, La Bruyère, et tant d’autres, le Siècle d’or espagnol touche à sa fin : si Pedro Calderón de la Barca ne meurt qu’en 1681, les poètes Luis de Góngora (1561–1627) et Francisco de Quevedo (1580–1645) ne passent pas la médiane du siècle, non plus que les dramaturges Félix Lope de Vega (1562–1635) et Tirso de Molina (1583–1648). En musique pourtant, les grands noms espagnols sont à placer au siècle… Lire la suite

Symphonies et Fantaisies pour les Soupers du Reyne

Publié le 4 aout 2015

C’était en 1990 que la jeune Simphonie du Marais, fondée trois ans avant, enregistrait pour Harmonia Mundi l’intégralité des Symphonies pour les Soupers du Roi de Michel-Richard de Lalande, en quatre disques. Il était bien juste qu’une sélection dans ces pièces trouve sa place dans une programmation festivalière consacrée entièrement à Louis XIV, et l’œuvre, contrairement à la Tafelmusik de Telemann, est restée une célèbre inconnue, en particulier à cause de la somme qu’elle représente : douze suites, pas moins de 158 pièces, près de cinq heures de musique. Pour composer, c’est-à-dire mettre ensemble, toutes ces pièces, Lalande a puisé dans divers… Lire la suite

Le roi de la guitare

Publié le 2 aout 2015

Dans une lettre adressée en mars 1737 à Son Altesse Royal Frédéric, futur roi de Prusse, Voltaire écrit à propos de Louis XIV : « on ne lui apprit qu’à danser et à jouer de la guitare ». Bien sûr, c’est très excessif, car Mazarin ne négligea nullement l’éducation du futur roi de France qui lui était confié, mais les mots de Voltaire rendent sans doute bien compte de ce que furent les passions de jeunesse de Louis XIV. Si la danse est bien connue, et surtout nécessaire à la représentation — Louis XIII, qui préférait manifestement les étapes préparatoires comme la composition de la musique ou… Lire la suite

Une journée avec le violon à la Chabotterie

Publié le 30 juillet 2015

Je fus hier, ma chère bonne1, au logis de la Chabotterie en Vendée, où la compagnie a été régalée de maints plaisirs enchanteurs. Nous eûmes d’abord loisir, étant arrivés dans le début de l’après-dîner [c’est-à-dire l’après-midi] de voir un peu l’intérieur du logis dont les pièces sont remplies d’attraits. Il s’y trouve un mélange curieux de l’hôtel particulier avec la maison de campagne. Mille objets anciens sont offerts à la vue, et l’on y remarque, outre des meubles dont l’antiquité va de la Renaissance pour les plus vieux, à l’époque de Louis XVI. La cuisine, quoique fort sombre,… Lire la suite

“L’Ouïe de Louis” : Musiques à la Chabotterie en majesté

Publié le 24 juillet 2015

Il est bien rare que devant un programme de festival, je me dise « j’ai envie d’aller à tout » — et d’ailleurs ça ne m’était jamais arrivé, car j’ai mauvais caractère et il y a toujours un concert au moins dont je me dis « ah, ça non ! » — ça ne m’était jamais arrivé jusqu’à compulser celui des Musiques à la Chabotterie de 2015. Hugo Reyne a choisi de le consacrer entièrement à Louis XIV et d’évoquer en quatorze concerts L’Ouïe de Louis, quatorze concerts pour un roi qui « fut guitariste, danseur, mélomane », écrit le directeur artistique, ajoutant, non sans malice : « on aimerait aujourd’hui… Lire la suite