“L’Ouïe de Louis” : Musiques à la Chabotterie en majesté

par Loïc Chahine · publié vendredi 24 juillet 2015

Il est bien rare que devant un programme de festival, je me dise « j’ai envie d’aller à tout » — et d’ailleurs ça ne m’était jamais arrivé, car j’ai mauvais caractère et il y a toujours un concert au moins dont je me dis « ah, ça non ! » — ça ne m’était jamais arrivé jusqu’à compulser celui des Musiques à la Chabotterie de 2015. Hugo Reyne a choisi de le consacrer entièrement à Louis XIV et d’évoquer en quatorze concerts L’Ouïe de Louis, quatorze concerts pour un roi qui « fut guitariste, danseur, mélomane », écrit le directeur artistique, ajoutant, non sans malice : « on aimerait aujourd’hui avoir des hommes ou des femmes de pouvoir aussi passionés de musique que lui. »

Il est rare, aussi, que les programmes qui affichent un thème ne s’y tiennent plus qu’à peu près et s’abstiennent de se permettre toutes sortes d’excursus. Même si je ne juge pas la qualité d’un festival au respect du thème qu’il se choisit, je ne pus m’empêcher, à propos de la programmation de Sablé, il y a quelques années, de me demander quel rapport il pouvait bien y avoir entre la Préciosité autour de laquelle les concerts étaient censés tourner, et les sonates pour viole de gambe et clavecin de Bach. Ici, le thème est on ne peut plus scrupuleusement respecté, et c’est d’autant plus réjouissant qu’il met à l’honneur la musique française. Le programme construit par Hugo Reyne a l’immense mérite de nous rappeler que programme thématique ne rime pas avec monotonie, mais qu’on peut, pourvu qu’on choisisse bien de quoi il s’agira, proposer des choses variées : ici, il y a les musiques “officielles” qui accompagnent le roi dans les cérémonies, à la promenade, lors de ses repas, il y a les musiques de la représentation, théâtrale ou religieuse, il y a les musiques de l’écoute “intime”, si l’on peut dire, et celles de la pratique (la guitare et la danse, en l’occurrence). Tous ces aspects sont ici illustrés, et si l’on croisera, comme on peut s’y attendre, Lully et Lalande, on se réjouit aussi d’entendre nombre de raretés comme la musique de Corbetta, qui fut le professeur de guitare du Roi Soleil, jouée ici par Xavier Díaz-Latorre (mardi 28 juillet) ou le répertoire honteusement délaissé de l’air sérieux, avec des airs de Lambert et de Le Camus confiés à Monique Zanetti et Claire Antonini (lundi 27 juillet).

Mais la musique “de” Louis XIV ne finit pas avec sa jeunesse, et la programmation convoque également les compositeurs qui, déjà, sont ceux du xviiie siècle, comme bien sûr Couperin, mais aussi Hotteterre qui sera illustré dans une lecture-concert de la Simphonie du Marais et Jacques Drillon autour de la mort du roi (lundi 3 août). J’en suis déjà à la mort, mais avant cela, il y a eu la naissance, et le Galilei Consort évoquera ce qu’a pu être la messe pour la naissance du dauphin, avec des compositions de Rovetta principalement (mercredi 29 juillet). Côté musique religieuse, il faut aussi signaler le concert de l’ensemble Athénaïs, composé d’œuvres pour voix de femmes qui ne sont pas sans évoquer l’action saint-cyrienne de l’épouse morganatique du roi, celle à qui la Princesse Palatine donne mille surnoms doux et gracieux (« l’ordure », « la vieille ripopée »…), Madame de Maintenon.

Oui, en consultant la brochure, je me suis dit que si je le pouvais, j’irais à tout, tant ce programme constitue réellement un tout. Je ne le pourrai pas, mais je compte bien entendre plusieurs de ces concerts, à commencer, dès ce dimanche 26 juillet, par celui de l’ensemble Aliquando « autour du violon et de la danse ». À suivre, donc…

INFORMATIONS

Festival Musiques à la Chabotterie, 19e édition, L’Ouïe de Louis, 14 concerts pour Louis XIV, direction artistique Hugo Reyne. Du 23 juillet au 5 août 2015, au logis de la Chabotterie (Saint-Sulpice-le-Verdon) et à L’Herbergement (Vendée).

Voir la programmation complète.

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